Visiter Rakvere n’est pas une évidence quand on se rend en Estonie et pourtant, elle a une certaine signification pour le pays. C’est d’ailleurs une de ses villes les plus anciennes puisqu’une charte lui accordant les droits de Lübeck est signée déjà en 1302 (ce qui est assez ancien pour l’Estonie). Une ville historique donc, connue pour être un véritable champ de bataille mais aussi pour son château de l’Ordre des Chevaliers teutoniques. Trop tentant que pour ne pas y aller jeter un œil.
À Rakvere, en train
Ce jour est un grand jour ! Enfin, après avoir visité 7 fois Tallinn sans avoir jamais mis les pieds en dehors de la capitale, me voilà prête à embarquer pour la première fois dans un train estonien. Si le train file vers Narva et la frontière russe, je vais m’arrêter quelques heures à Rakvere, petite ville historique célèbre pour la bataille qui eut lieu ici, en 1268, entre les troupes coalisées des chevaliers Teutoniques, danoises et estoniennes d’un côté et les forces russes de l’autre côté (avec une victoire des coalisés). Pourquoi m’arrêter là ? J’avais envie de humer l’ambiance d’une « ville de province », vu que mes autres destinations au programme (Tartu et Pärnu) sont de grandes villes à l’échelle estonienne.
Je grimpe donc à bord d’un wagon d’Elron, la compagnie ferroviaire locale. Bien que le drapeau estonien soit fait de tons assez neutres (le bleu, le blanc et le noir), les trains sont ici habillés d’orange et de gris. Evacuons vite le cliché : on est loin des vieux trains soviétiques tel celui que j’avais rencontré en Moldavie. Prise, Wi-Fi et si vous n’avez pas eu le temps d’acheter votre billet avant d’embarquer, un distributeur se trouve à bord, pas d’excuses ! Une chose qui m’a surprise, c’est que les wagons sont en nombre réduit (4 ou 5, tout au plus). Moi qui suis habituée aux longs trains belges, mais en réfléchissant, c’est logique ! L’Estonie est presque 10 fois moins peuplée et le réseau ferroviaire n’est pas spécialement bien développé avec des lignes qui se comptent sur les doigts des deux mains mais pour circuler entre grandes agglomérations, c’est parfait et confortable.
Très vite, nous nous extirpons de Tallinn et nous voilà en train de traverser des paysages fait de grandes forêts de pins, de sapins et de bouleaux qui ne semblent plus vouloir finir. C’est ainsi que je m’imaginais la campagne estonienne ! A l’approche de Rakvere, l’horizon s’éclaircit et j’aperçois des champs et des prairies remplis par millier de pissenlits, Le vert tendre des prairies du printemps, un grand ciel bleu, des petits nuages et sur le vert, une piquetée de jaune. C’est joli, charmant même, une rêve bucolique de fond d’écran Windows ! Enfin, après une bonne heure et vingt minutes, me voilà arrivée à Rakvere !
La gare semble étrangement fermée, bien qu’elle ait l’air d’avoir été rénovée récemment. Il faudra une petite quinzaine de minutes pour rejoindre le centre-ville et 5 de plus pour arriver à la Gare des bus qui est toute neuve. C’est à la consigne de la gare des bus que je vais laisser mes bagages. je les récupérerai avant de prendre mon bus pour Tartu. En attendant, allons explorer cette terre inconnue.
Premières impressions et Place Centrale de Rakvere
Ces dernières années, Rakvere s’est refaite une beauté, en commençant par sa Place centrale. Une grande esplanade piétonne ornée de sculptures en forme de lampes à abat-jours jaunes. Plutôt ludique ! La place est bordée par les halles de Rakvere, un bâtiment construit dans les années 20. Malheureusement, les halles ont perdu leur fonction mais on y trouve quelques magasins. C’est aussi sur la place du marché que je vais croiser une des nombreuses statues de la ville : Jeune homme sur sa bicyclette qui écoute de la musique, érigée en hommage à Arvo Pärt, le célèbre compositeur de musique classique et contemporaine qui passa une grande partie de son enfance à Rakvere (son « Kyrie » est joué par les cloches de l’église de la Trinité tous les midis).
Kirikupark
Justement, l’église de la Trinité se trouve de l’autre côté du Kirikupark (le bien nommé Parc de l’église), un des parcs qui divisent le centre-ville en deux. Cette solide construction du XVIIe siècle est ouverte de la mi-mai à la fin septembre et sur demande le reste de l’année (pas de chance pour moi, j’étais là avant le 15 mai). Le parc constitue une petite promenade agréable le long d’un charmant étang. L’occasion de jeter un coup d’œil rapide à l’énorme hôtel-spa + parc aquatique (l’Aqva Hotel & Spa) qui s’y est installé.
Pikk Tänav
Le parc se situe dans un creux et quand j’arrive de l’autre côté, sur la rue Pikk, j’ai un peu l’impression d’être sur une digue à plusieurs étages. Si vous vous baladez en Estonie, vous aller sans doute rencontrer une Pikk tänav dans toutes les villes. C’est l’équivalent de nos grands-rues. Cette large voirie semi-piétonne est bordée de très beaux bâtiments qui datent essentiellement de la Belle-Epoque. Certains sont en pierre, d’autres sont en bois et tous sont pimpants car à peine rénovés ou en cours de rénovation. C’est bien simple, j’ai eu l’impression d’être dans un décor de cinéma. Le fait d’être quasi seule à m’y balader a dû contribuer à cette drôle de sensation.
Parmi les bâtiments notables, il y a l’Eglise de la Trinité, la maison de retraite Eakate Kovu, au numéro 13 (superbe bâtiment en pierre), la Rakvere Galerii au numéro 15, la maison « Optika » au numéro 17 (superbe petit bâtiment en bois sculpté), le magasin d’artisanat Viru Handicraft Salon (de style Art Déco), la boutique d’antiquité Hansa Antik au numéro 7, la boutique de vêtement et de souvenir Marit kasitöö. Il y a même une guesthouse, Katariina, un numéro 3. Mais le lieu à ne pas manquer, c’est l’esplanade avec la sculpture de la Petite Edith et l’escalier en forme de carotte et qui vous permet d’accéder à une plateforme pour observer dans toute sa gloire l’attraction principale de la ville : le Château de Rakvere.
La renaissance du Château de Rakvere
Le Château de Rakvere (qu’on appelle aussi Chateau de Wesenberg, du nom allemand de Rakvere) que l’on peut voir aujourd’hui fut construit au XIVe siècle par les Chevaliers de l’Ordre teutonique. Sur cette butte, s’était déjà érigé un fortin estonien puis un petit château danois (avant que ceux-ci ne vendent leurs terres livoniennes à L’Ordre. Amélioré par les Chevaliers, puis par les Russes qui avaient pris le château lors de la dissolution de l’Ordre, il est finalement pris par les Suédois en 1581. Au début du 17e siècle, pendant la guerre suédo-polonaise, le château est endommagé par les deux parties et restera en ruine. Ultime indignité, son dernier propriétaire le transformera en carrière de pierres. Aujourd’hui, le château a repris des couleurs est devenu en véritable parc d’attractions médiévales : démonstrations des métiers du XVIe siècle, activité comme du tir à l’arc, de la calligraphie à l’aide de plume d’oie et bien sûr, des expositions plus classiques comme la visite du réfectoire… et même la reconstitution d’un bordel.
Bref, pas le temps de s’y ennuyer et il faut plusieurs heures pour explorer le château. Si vous avez le temps d’essayer, une taverne qui sert des plats d’époque s’y trouve également. Malheureusement, ce temps, je ne l’ai pas et je ne ferai qu’admirer le bâtiment, et la statue d’un auroch (Tarvas) posé sur la colline de Vallimägi.
L’après-midi est déjà bien avancé et mon bus pour Tartu m’attend. Je retiens de Rakvere l’ambiance calme, très calme d’une ville qui est en fin de mue et voudrait se faire mieux connaître. Je pense qu’y revenir, pour la voir évoluer, ne serait pas une mauvaise idée !
Où manger à Rakvere ?
Art Café
Ce charmant café est l’endroit idéal pour prendre son petit-déjeuner, casser la croûte à midi où dévorer une pâtisserie au goûter. Et en plus, il est tout à côté de la place centrale. Le café est tout simple, sans fioriture mais gai grâce aux œuvres d’art qui y sont exposées. Au menu, une cuisine simple mais efficace : salades, burgers, filet de saumon grillé, filet de porc, les sacro-saintes crêpes (sucrées et salées), des tartes, des gâteaux… Etant pressée, j’ai tout simplement opté pour une soupe du jour (un bouillon de poulet bien dosé en aneth, probablement l’herbe préférée des Estoniens) servie avec du pain. J’ai adoré… mais les pâtisseries me faisaient bien de l’œil aussi.
Lai 13
Rakvere
Comment se rendre à Rakvere
Rien de plus simple, vous avez le choix entre le bus et le train.
Depuis Tallinn, prendre le train en direction de Narva (les prix varient entre 6,21 € et 8 € selon que c’est un express ou pas). Il y a 6 trains par jour entre 6h45 et 21h48 avec un gros trou en matinée). La ville est à un bon quart d’heure à pied. L’autre option est le bus, depuis la gare routière de Tallinn avec des prix similaires (voire un peu plus chers, cela varie selon les prestataires) mais la gare routière de Rakvere, toute moderne, est tout à côté du centre-ville. Vous y trouverez une supérette, des toilettes et une consigne à bagages. Les bus circulent de 8h15 à 18h45.
Rakvere peut aussi être rejointe depuis Tartu sans escales. Pour les bus, je vous recommande fortement la compagnie Lux Express, super confortable avec Wi-Fi à bord et ils sont généralement les moins chers. Je les ai maintes fois pris.
Merci beaucoup pour cet article. Je ne suis jamais allé en Estonie et ton article donne envie. Surtout cette ville qui m’était totalement inconnue jusqu’alors. Bonne journée !
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