Il y a deux semaines, j'ai eu l'honneur de faire une présentation dans le cadre des conférences de l'antenne bruxelloise d'Aventure du Bout du Monde sur le thème du Voyage en solo au féminin. Entourée par Pauline de Madame Bougeotte et Julie la Moitié de Du monde au tournant nous avons chacune évoqué des aspects différents de ce thème. Pauline dans une présentation générale, Julie dans une approche un peu "réflexive" du voyage en solo. Quant à moi, lorsque Bérangère d'AVBM m'a sollicitée pour participer à ce panel, il me semblait évident que 1 : j'étais la plus âgée et 2. J'étais celle qui avait attendu longtemps avant de partir au "long cours". J'avais donc envie de toucher toutes ces femmes (et hommes) qui penseraient peut-être qu'il est un peu tard à présent pour songer à voyager à quarante ans et plus.
Une vie d'expat', mais pas de voyageuse
J'ai toujours eu l'âme qui avait la bougeotte... mais j'ai dû attendre pas mal de temps avant de vraiment voyager, du moins de prendre mes propres décisions de voyage. Les études, le mariage, l'expatriation... la vie, quoi. Elle vous prend dans un tourbillon, et vous joue des imprévus qui font que vous ne pouvez pas, ou ne pensez pas réaliser un de vos objectifs. Mais pendant mon expatriation j'ai beaucoup bougé... J'ai même mené une vie de vraie nomade (avec caravane comme seul domicile fixe) et pourtant, je n'ai jamais vraiment interprété cela comme du "voyage". C'était plutôt le cours ordinaire de ma vie. Ce sera la première fois que je partirai un week-end absolument seule qui me fera sentir réellement "voyageuse". En pleine possession de mon expérience. Et lorsque je suis partie en citytrip seule pour la première fois (à 34 ans !), je me suis rendu compte qu'en fait non, je n'avais jamais vraiment voyagé avant !
Le déclic
On a toutes et tous ce moment-là. Ce moment où on prend la décision et où notre esprit ne fera ni objections, ni retour en arrière. Et souvent, ce déclic vient d'un événement marquant ou traumatisant : la fin des études, une rupture, un deuil, un licenciement...
Ce moment de crise ou de confusion va nous permettre de nous mettre en rupture face au cours actuel de notre vie, de dire stop, qu'il est temps de faire quelque chose pour nous-même et de prendre un recul bien nécessaire. C'est ce moment où se dit qu'on n'a rien à perdre et tout à gagner qui nous fait sauter par-dessus le fossé de la peur.
Cet élément déclencheur pour moi, vous le savez déjà. ce fut un accident. Même si j'en porterai les séquelles jusqu'à ma tombe, c'eut pût être plus grave. Mon rêve de voyage au long cours auquel j'avais tant réfléchi aurai pu ne jamais devenir réalité. Et soudain, tous les obstacles que j'avais planté devant moi devinrent beaucoup moins insurmontables, voire même s'évanouissaient.
Ce déclic, il est évidemment intime à chacun mais quand il arrive, croyez-moi, vous le saurez.
Il n'est jamais trop tard !
Durant mon tour du monde, j'ai croisé assez bien de baroudeuses d'âge mûr, voire senior ! Étrangement, je n'ai pas vu d'homme de mon âge ou plus voyager en solo. Étrange... Je ne sais pas si d'autres voyageurs qui liront cet article me le confirmeront.
Parmi ces femmes rencontrées, je songe à Liliane, 72 ans. Cette Française rencontrée au Brésil avait toujours rêvé de voyager. Coincée par les conventions sociales de son époque, elle s'est mariée sans guère être amoureuse, a élevé ses enfants et une fois devenus grands, a demandé le divorce et mis les voiles. Une fois par an, elle consacre trois-quatre mois à un seul pays et le parcours à fond.
Je pense aussi à cette voyageuse française, venue visiter son fils expatrié à Buenos Aires et qui allait visiter l'Argentine en solo par la suite ou encore cette Suissesse fraîchement retraitée au début de sa traversée en Nouvelle-Zélande. Nous avions fait connaissance à une terrasse à Auckland avant de se retrouver par hasard à Christchurch.
Ces voyageuses semblent faites de deux pâtes :
- Soit ce sont des grandes voyageuses qui continuent de le faire (la voyagite est une maladie incurable)
- Soit elles en ont toujours rêvé, mais ont dû attendre LEUR bon moment pour le faire (comme moi)
Tout ça pour dire : il n'y a pas d'âge pour commencer à voyager seul(e). Ce n'est pas qu'un "truc de jeunes" et tant que l'envie et la santé sont là, il n'y a aucune raison de faire de son âge un obstacle.
Ce qui nous bloque
Il y a toujours de « bonnes » raisons de ne pas réaliser son rêve. La bonne nouvelle, c'est qu'il y a aussi des techniques pour surmonter les obstacles.
Voici quelques unes des raisons qui nous empêche de faire un pas en avant :
- Les finances : C'est évidemment le point le plus critique et il n'y a pas de secret : il faut économiser, ce qui signifie faire des sacrifices (chaque choix dans la vie étant de renoncer). Songer qu'avec le prix d'un mojito, vous vous pourriez vous payer 3 ou 4 repas dans la rue en Asie du Sud-est. Ou que le prix d'une nouvelle veste (qui vous fait de l’œil mais n'est pas indispensable) peut bien couvrir un trajet en bus ou une nuit dans une auberge. Il y a aussi d'autres techniques pour amortir le choc. Si vous êtes locataire, que vous partez pour quelques mois et souhaitez garder votre appart' (et que votre propriétaire est d'accord), vous pouvez sous-louer. Vous êtes propriétaire ? Louer votre bien (ça vous fera des revenus en plus).
- Le travail/la carrière : Finalement le point le facile à gérer ! Vous êtes en fin de contrat ou démissionnez pour voyager ? Pas de soucis, donc. Vous souhaitez retrouver un emploi à la fin de votre voyage ? En France, il existe le congé sabbatique. En Belgique, depuis abrogation de crédit-temps sans motif pour le secteur privé, il n'existe pas 36 solutions : c'est la négociation d'un congé sans solde.
- La famille et les proches : Pas toujours facile de laisser derrière soit ceux qu'on aime. A la fois parce qu'il y a des chances qu'un de vos proches ne comprennent pas votre démarche et que l'inquiétude sera générale mais aussi, parce qu'à un moment sur la route, votre famille et vos amis vont vous manquer. Pour le premier aspect, il faudra discuter, rassurer, affirmer votre choix, expliquer que c'est pour votre bien. Famille et amis et vous aime et si on ne peut pas empêcher leur inquiétude, on peut au moins les rendre heureux pour nous. Et partager avec eux des moments via les réseaux sociaux, les messageries... Ce monde est finalement devenu si petit.
- La peur de l'inconnu, de l'affronter : Mais avouez le, c'est aussi un peu pour l'adrénaline que cela procure qu'on aile découvrir des endroits inconnus. Mais imaginer vous réveiller tous les jours face à une journée qui ne sera jamais comme la précédente : avec des tas de choses à découvrir et apprendre, avec le contrôle complet sur ce que vous allez faire, voir... C'est pour moi la plus grande sensation de liberté qu'il m'ait été donné de vivre. Il y a aussi des tas d'autres peur : celle de ne pas être "capable", pas "à la hauteur". C'est celle que je connais le mieux : et si je n'arrivais pas à maintenir mon budget ? Et si je ne supporte finalement pas la solitude ? Et si je fais des bêtises (perdre mes cartes de banque, me blesser ?). Croyez-moi, ce genre de désagréments, j'en ai eu (et je devrai d'ailleurs en faire un article). Une foule de tuiles 'est tombée dessus (et nul doute que des désagréments vous arriverons, comme ça peut arriver dans la vie de tous les jours) mais la bonne nouvelle, c'est qu'il y a toujours une solution, toujours de bons samaritains qui sont prêts à vous tendre une main secourable, sur place ou loin. Vous serez surpris. Et ces galères surmontées vous apprendront à la fois à prendre plus confiance en vous mais aussi, à retrouver un peu de foi en l'humanité.
Ce qui peut vous arriver
Rencontrer des personnes improbables (comme DJ Uncle Phil à Auckland), créer des liens qui vont transcender les frontières et le temps qui passe (comme Melina et sa fille Evaina, chez qui j'ai logé à Papeete) ou de simple moment où l'on est seule face au spectacle de la nature, comme à Koh Mak.
Avec DJ Uncle Phil... le parrain.de la scène House en #NouvelleZélande..;-)
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Deux Tahitiennes découvrent la Kriek. 😉 #bxlblog
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Dernier jour au paradis... en profiter le plus possible...#mathailande #MelDoesThailand #seakayak
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Voyager en solo à 40 ans et plus...
Le budget
Dans la majorité des cas, on voyagera différemment quand on a 40 ans et plus que quand on a 20 ans.
On appréciera sans doute plus de confort, notamment dans le logement, les transports, les repas... On ira toujours à l'auberge de jeunesse, mais on prendra une chambre individuelle plutôt qu'un lit dans un dortoir, on aura envie de se faire plaisir en mangeant dehors ou on hésitera un peu moins à voyager dans une classe supérieure, surtout pendant les trajets de nuit.
Conséquence ? Un budget plus important quand on sait que le poste principal du budget d'un voyage est le logement, ça peut facilement doubler, voire tripler votre budget face à celui d'un backpacker.
Un « trou » générationnel
C'est une des choses qui m'avait frappée lors de mon tour du monde. Les voyageurs de mon âge, du moins en solo, sont plutôt rares. Et en y réfléchissant bien, c'est tout à fait logique. Entre 30-35 ans et l'âge de la retraite, c'est le moment dans la vie où on construit sa carrière et sa famille. On aura moins tendance à partir au long cours, ou on partira en couple ou carrément en famille (j'en ai croisé quelques unes). Rencontrer d'autres voyageurs de sa génération devient donc une gageure, ce qui ne facilite pas les rencontres, même en auberge (je dois bien avouer que j'y ai pris de fameux coups de vieux) mais il est évident que nous partageons tous une chose en commun : le voyage ! Et ça devrait être assez comme base pour au moins entamer une conversation (si les smartphones et ordi de vos interlocuteurs potentiels vous en laisse l'opportunité). Donc, un peu de souplesse et dépassons les préjugés dus à l'âge et dans lesquels on peu vite s'enfermer.
Des locaux curieux
Par contre, vous aurez droit à plus d'attention de la part des locaux, souvent curieux de voir une femme d'âge « mur » voyager seule. On vous posera des questions (souvent parmi les premières, on trouvera " Mais où est votre mari ? "). Vous ne compterez pas non plus les demandes en mariage pour combler tout ça. 😉
Pour nourrir votre réflexion, je vous invite à regarder le Facebook Live de la conférence, que j'ai faite (avec l'aide de Pauline lorsque j'étais sur scène, merci à elle) et vous invite à poursuivre le débat, en commentaires ou sur Facebook, comme ce fut le cas lors de l’événement.
Vous en avez toujours rêvé ? La route vous attend ! Et j'espère que ma petite tape dans le dos aura modestement contribué à faire le premier pas !
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Magnifique témoignage
Je me reconnais tout à fait dans votre description
J’ai fêté mes 44 en 2017 en voyageant solo une année en Amérique latine
J EN MEURE D’ENVIE MAIS JE NE PARLE PAS ANGLAIS ?????
On peut très bien se débrouiller avec des gestes… Dans certains endroits dans le monde (en Amérique latine par exemple), l’anglais n’est pas spécialement parlé couramment alors, on se débrouille. Si ça peut aider à te sentier plus à l’aise, peut-être suivre de cours d’anglais quelques mois avant le départ ? Ou apprendre avec une app comme Duolingo ? Je m’en suis servie pour apprendre quelques notions de portugais avant de partir au Brésil. J’y consacrai une demi-heure tous les jours. Quoi qu’il en soit, que cela ne te freine pas dans tes envies.
MERCI A TOI
MAIS SI JE ME FAIS COMPRENDRE AVEC DES GESTES JE PENSE QUE CE N’EST PAS COMPATIBLE POUR TOUTES LES QUESTIONS ET COMMENT VEUX TU QUE JE COMPRENNE LA REPONSE EN RETOUR ???
Bon, on ne peut pas tenir toute une conversation mais ce n’est pas si grave. Dans le pire des cas, il y a Google translate, qui fonctionne de mieux en mieux. Je m’en suis servie en Chine et en Géorgie (il faut juste télécharger la langue sur le smartphone pour avoir accès à la traduction sans avoir besoin de réseau).
Je voyage seule depuis 10. 12 ans et j ai 66 ans. Le problème de la langue n en est pas un on arrive toujours à se faire comprendre
Il faut sauter le pas.
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