Fabuleuses Féroés : Tórshavn, Night and Day

Il est près de 22 heures quand le bus de l’aéroport dépose ses passagers à Tórshavn. Le chauffeur avait attendu jusqu’à ce que le petit aéroport soit vide avant de démarrer. Malgré l’heure tardive, il fait encore clair. Nous sommes à 62 degrés nord et d’ici quelques semaines, il n’y aura pas vraiment de nuit sur l’archipel. Me voilà donc en route pour mon hôtel. Durant la moitié de mon séjour, je serai logée chez l’habitant (merci couchsurfing) mais vu l’heure de mon arrivée (et pour me poser), je passerai ma première (et ma dernière nuit), à l’Hôtel Streym, le plus « abordable » (tout est cher aux Féroé) des hôtels de Tórshavn.

Armée de mon smartphone, je cherche l’endroit où se trouve l’hôtel. Un joggeur me croise, et entre deux petites foulées me jette « L’hôtel, c’est 2 minutes plus loin! ». Et avec cette simple parole, tout est dit sur les Férigiens. Il y a une simplicité dans les rapports avec les autres qui me surprend. Je pensais trouver une mentalité nordique : polie, cordiale mais un peu froide et distante au premier abords. Et ce n’est pas le cas. A l’hôtel, un jeune géant attendait mon arrivée. « Bonjour, vous êtes Mélissa? On vous attendait. Vous êtes arrivée avec le bus?  » Et oui, tout se sait ici, aussi!

Faroe Islands: Day 1 in Tórshavn

Le temps de déposer mes affaires, de consulter mes mails et la nuit est tombée sur la ville. Enfin, quand je dis nuit… une lumière diffuse reste présente dans ce ciel boréal… il est pourtant presque 23 heures. Je réfléchis un moment. C’est le point le plus septentrional que j’ai jamais atteint. Et j’irai encore plus au nord d’ici quelques jours! Les nuits de Tórshavn sont fraîches, humides et venteuses… Lectrice, Lecteur, s’il y a UNE seule chose que tu ne dois pas oublier d’emporter avec toi lorsque tu visiteras ces contrées, c’est bien le coupe-vent, uniforme officiel des Féroé! Sur la première partie du port, les bateaux ballottent presque silencieusement, de petites lumières éclairent faiblement les bâtiments de style résolument nordique. Pas une âme qui vive dans les rues par contre. Le grand Tórshavn ne compte qu’une petite vingtaine de milliers d’habitants et nous sommes dimanche. Moi pensais boire ma première bière féringienne ce soir, ça semble plutôt compromis, les cafés ont l’air d’être tous fermés… sauf le bar de l’hôtel Tórshavn. Une dame s’apprête à partir, et moi je rentre. Je commande une bière à la jeune serveuse… et m’aperçois que j’ai oublié mon portefeuille et ma carte bancaire  à l’hôtel. La serveuse me sourit: « Ce n’est pas grave, j’allais fermer. Ce sera un verre de bienvenue ». On papote un peu… la saison touristique n’a pas encore commencé et la capitale est comme un gros village endormi. D’ici deux-trois semaines, les bateaux de croisière arriveront et tout s’animera. Je termine ma bière en vitesse pour ne pas retenir trop tard la gentille serveuse et rentre à l’hôtel. Demain, il y aura tant à explorer!

Faroe Islands: Day 1 in Tórshavn Faroe Islands: Day 1 in Tórshavn

Le jour s’est levé d’ailleurs tout gris… Une fine bruine commence à tomber au moment où j’arrive au fort de Skansin, un tout petit fortin datant du XVIe siècle, construit pour protéger le bourg des raids de pirates. Il en reste quelques bâtiments, un phare et quelques canons britanniques et danois, souvenirs du passage des forces de sa Gracieuse Majesté qui avaient fait des Féroés une base pendant la 2e Guerre Mondiale. J’y croise une famille allemande. Tiens, il y a donc quelques touristes en cette saison! Tórshavn est si petite que tout s’enchaîne très vite. A côté de la première partie du port, celle des ferries, se trouve la péninsule de Tinganes. C’est ici que l’on réalise que malgré son éloignement du continent, la cité est plutôt ancienne. Au IXe siècle, les premiers  Vikings fondèrent un village, qu’ils baptisèrent le « Port de Thor ». Et comme toutes communautés de Vikings, ils avaient un parlement, le “thing”, installé sur la péninsule.

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Aujourd’hui encore, Tinganes est le centre politique et administratif des îles. C’est tout au bout du promontoire que se trouvent les bureaux des différents ministères et l’ancien parlement. Tous sont logés dans une simplicité toute nordique, dans des maisons en bois rouges. L’ancien parlement semble plus une maison de grand bourgeois qu’à une assemblée du peuple. Tinganes, c’est aussi le quartier historique. Aussi compact que soit ce quartier, il est facile de se perdre dans ses rues minuscules entre les petites maisons de bois recouvertes de goudron et de toits d’herbes. Et partout, des signes de vie. On entend de temps en temps une radio, le bruit de casserole, de la fumée qui sort d’une cheminée… mais personne en vue. Et la bruine continue de tomber. On peut y passer un long moment à imaginer la vie dans ce qui était un village de pêcheur jusqu’à la fin du XIXe siècle, quand Tórshavn a connu son premier boom démographique. Je descends vers la cathédrale et me ballade le long de la 2e partie du port, là où débarquent les paquebots de croisière. Malheureusement, la cathédrale était fermée…

Faroe Islands: Day 1 in Tórshavn

Pour mieux faire connaissance avec la ville, je prends à droite pour rejoindre l’office du tourisme de la ville, situé dans la la H. N. Jacobsens Boghandella plus vieille librairie encore en fonction d’Europe. Cette grande maison rouge bordée d’érables  est un des lieux les plus reconnaissable de Tórshavn.  De l’autre côté du bâtiment, se trouve la boutique de souvenirs/librairie mais cette maison recèle d’autres secrets que je vous raconterai dans un prochain article. 😉

Faroe Islands: Day 1 in Tórshavn

De là, il est facile de rejoindre LA rue commerçante des Féroé: Niels Finsens Gota. Lectrice, Lecteur, si tu as oublié de t’équiper pour la météo capricieuse des Féroé – coupe-vent et chaussures de randos waterproof obligatoires – c’est le moment de le faire. Il n’y  a pas moins de 2 magasins de sports! Mais le lieu que je recherche est un brin plus raffiné. Me voilà devant la boutique de pulls 100% laine férigienne de Gudrun & Gudrun. Les deux Gudruns doivent être les Férigiennes les plus connues au monde. Et pour cause : les pulls de l’héroiïne de “The Killing”, Sarah Lund, c’est Gudrun & Gudrun! D’ailleurs, l’une des Gudrun est occupée à sa machine à coudre, en train d’assembler un pull. J’y étais entrée pour jeter un œil et prendre une photo… mais voilà qu’un superbe pull beige à motif de flocons bruns-noirs et col en « V » me fait de l’œil… « Puis-je l’essayer? » Gudrun me montre le chemin vers la cabine d’essayage. Je sors pour me regarder… et je vois Gudrun qui me lance un large sourire! « Attendez… elle vient près de moi et ajuste les épaules. « Voilà, regardez-vous ». Et tu sais quoi? Il y a des moments où un vêtement te va tellement parfaitement que tu n’as pas d’autre choix que de l’acquérir. Forcément, ce pull, il a été tricoté pour moi! J’entends à peine Gudrun me raconter que c’est de la laine non-traitée. « Elle pique  ? » « Non, non! C’est très bien. Et quel est le prix ? ». Je manque de choir. L’équivalent de 280 Euros. Trop tard. Il me le faut. Je ne me sens même pas sortir ma carte de crédit.  Avant de partir, je prend une photo de la styliste et reprends mon chemin. D’ici, je vais rejoindre la Nordic house. en route je croise le stade de football national. C’est un peu un symbole pour moi… Les seules fois où l’on entendait parler des Féroé, c’était lors de qualifications pour la Coupe du Monde de football et il se trouve que la Belgique était dans le même groupe qualificatif que les Féroé. Ce match, je l’ai regardé. Je me souviens d’un stade à peine plus grand que celui de la petite ville la plus proche de chez moi. Je crois que la fascination a pris racine à ce moment là. Même s’il est certainement plus moderne qu’à l’époque, il n’y a que 6000 places dans le stade mais les Férigiens sont connus pour être parmi les plus chauds supporteurs d’Europe. Vu le nombre de gamins que j’ai vu jouer au foot par tous les temps, ça ne m’étonne pas…

Faroe Islands: Day 1 in Tórshavn
Faroe Islands: Day 1 in Tórshavn
Faroe Islands: Day 1 in Tórshavn
Faroe Islands: Day 1 in Tórshavn

Je ne fais que passer devant le Listasavn Føroya (le musée d’art) , je compte m’y rendre dans les prochains jours et un peu plus loin, m’y voilà: la Nordic House. l’antenne culturelle du Conseil nordique, qui regroupe les pays scandinaves: l’Islande, les Féroé, les îles Aaland et le Groenland. La Nordic House est devenu le foyer culturel des Féroé, proposant concerts, expositions mais aussi, le sentiment d’appartenir à un ensemble culturel plus large. Dans ce bâtiment noir comme le basalte des îles qui l’ont vu naître, son toit d’herbe est islandais, son entrée en pierres norvégiennes, ses meubles finlandais, son parquet suédois et ses poutres et son verre sont danois. Pas de chance pour moi, une exposition était en préparation mais j’ai pu profiter quasi seule de l’endroit, aéré et chaleureux (tout ce bois!), typiquement nordique et prendre un petit café. Il faudra y revenir lors d’une activité! Je profite du calme et déguste mon café à petite gorgée en admirant le panorama sur la ville et la mer, qui chatoie lorsque le soleil perce quelques secondes à travers les nuages. Cette météo, parlons-en! Je suis là depuis un jour et elle m’affecte déjà! En quelques minutes, tout peut changer. La bruine a laissé la place à un ciel tourmenté par le vent et maintenant, il se dégage. Qui sait comment il sera dans un quart d’heure! Je me dis qu’il faut avoir un sacré caractère pour résister à une météo aussi capricieuse!

Faroe Islands: Day 1 in Tórshavn
Faroe Islands: Day 1 in Tórshavn

Pour le retour, je fais un petit arrêt au SMS, le plus grand centre commercial des Féroé (impossible de manquer son imposante structure). Mon petit pêché mignon lorsque je visite un nouveau pays, c’est de parcourir un supermarché, pour m’imprégner du goût des autres. Et justement, le supermarché du SMS est le plus grand du pays. Outre le rayon poisson évidemment bien fourni, c’est le rayon « viande » qui surprend: on y trouve des pièces de 10 kilos: mouton, agneau, bœuf, porc… Il semble que les habitants des autres villages viennent faire leurs grosses courses ici pour ne pas revenir avant un mois au moins!  Peut-être oserez-vous quelques spécialité gastronomiques comme la charcuterie de mouton (il y a plus de moutons que d’habitants aux Féroé), ou bien… la baleine. Pas très politiquement correct mais typique! Je ne m’attarde pas trop. J’aurai sans doute l’occasion de repasser par ici et comme le soleil a daigné se montrer, je repars vers Tinganes pour reprendre quelques photos. Je consulte mon iPhone. Presque 17 heures! Je dois retourner à l’hôtel chercher mes bagages. C’est que je suis attendue par Rakul et sa famille… et je suis un peu dans mes petits souliers.

Le set complet de cette première journée se trouve sur Flickr.

Cet article a 20 commentaires

  1. Piotr

    J’aime les photos des maisons colorées recouvertes d’herbes et les pavés bien démarqués et luisant…

    1. Melissa

      C’est très pittoresque et mignon… et les maisons sont si petites, c’est presque difficile à imaginer que des gens y habitent!

  2. Lucie

    Tes photos sont très jolies, ça a l’air vraiment « mignon » là-bas. J’espère qu’il ne va pas rétrécir au lavage ton pull :/

    1. Melissa

      Il a tenu le coup au premier lavage. A froid et programme « lavage à la main ». 😉

  3. On dirait des maisons de hobbits… y’a-t-il une raison pour l’herbe qui recouvre les toits???

    1. Melissa

      Excellente question, Benoît! Les toits d’herbe sont très répandus dans les Féroé et en Islande (il y en a aussi dans les autres pays scandinaves, mais moins). L’herbe est utilisée pour son pouvoir isolant. D’autant plus que ces terres étaient isolées et pauvres, donc un toit d’herbe était un moyen simple, gratuit et efficace de se protéger des éléments.

  4. fabrice

    Je t’envie, cela devait être magnifique! J’aime l’Europe du Nord et ses paysages!

    1. Melissa

      Et tu n’as encore rien vu, Fabrice! ;D
      Les Féroé, c’est petit, mais grandiose.

  5. Retour du Monde

    Aaaaah les Iles Féroé, dans notre « wish list » depuis bien trop longtemps, il va vraiment falloir qu’on saute le pas. Merci pour cette article plein d’infos 😉

  6. Laponico

    Waouh, ça a l’air magnifique…un peu difficile ou cher pour y aller, mais ça semble si irréel…

    1. Melissa

      Ah çà… c’est encore rien. 😉 Une fois qu’on quitte la ville, c’est époustouflant! Pour la difficulté de les rejoindre, justement, les Férigiens en souffrent aussi. C’est très difficile et cher pour eux de voyager n’importe où… C’est une perspective que les continentaux n’ont pas. C’est si facile pour nous de nous déplacer: il suffit de prendre une voiture, un train, l’avion et HOP, on est ailleurs. Bon, les Féroés aussi ont l(avion (et le ferry pour l’Islande) mais il y a un quasi monopole d’Atlantic Airways. Donc, pas de concurrence, donc les prix sont assez chers. Pour le billet, il y a moyen de se dégoter un billet pour 500 Euros mais une fois sur place, c’est CHER! Logement, nourriture… ça douille!

  7. Les Féroés, rien que l’exotissme du nom fait envie ! Grand amoureux du Nord, c’est un régale de voir ces quelques photos, ces maisons colorées et ce ciel menaçant que j’aime tant. Par contre pour Gruntrung & Gtrundrure (sincèrement pardon), il va me falloire encore un peu d’entrainement pour le faire sortir correctement, même à la lecture ça rape.

    1. Melissa

      Non, non, ça ne rape du tout. 😉 Je ne sais pas ce qu’elle ont fait à la laine, mais la première Gudrun quand elle m’a fait essayer le pull, m’a bien spécifié que ça ne piquait pas! Et je confirme.

      1. Ahhhh mais je n’en doute pas !! Je parlais juste du nom que j’ai beaucoup de mal à prononcer ^^

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