Cette fois, notre nouvelle, et dernière, étape de ce voyage dans les Hauts-de-France nous emmène à Calais. Tu le sais, Lectrice, Lecteur, j’aime les villes qui ont une mauvaise réputation : Le Havre, Dunkerque, Charleroi… Dans l’esprit de nombreuses personnes, Calais reste associé aux nombreux migrants qui essaient de traverser la Manche et de changer leur destin au Royaume-Uni, plutôt qu’à la dentelle et sa riche histoire. De plus, la ville a été largement détruite durant la Seconde Guerre Mondiale. Pourtant, avec sa plage et son passé à la fois historique et industriel, Calais à pas mal d’atout pour elle.
Cet article a été écrit dans le cadre d’une collaboration avec Hauts-de-France Tourisme mais les opinions de l’auteure lui restent propres.
Yves Saint-Laurent et la dentelle de Calais
Notre découverte de Calais va commencer par une production qui a fait la renommée de la ville : la dentelle, ce tissu arachnéen, tout en transparence. Nous voilà donc à la Cité internationale de la dentelle et de la mode, juste en dehors du centre-ville. Evidemment, le musée a investi une ancienne usine dentellière, l’usine Boulart. Un lieu plutôt populaire puisqu’il y a tout un bus de touristes qui débarque en même temps que nous. Pas de soucis, le musée est grand et nous laissons le groupe prendre de l’avance avant de commencer notre visite.
L’espace muséal propose une collection qui permanente qui explique l’histoire de la dentelle, sa fabrication, son évolution à travers les années et une large partie (tout le premier étage) est dédié aux expositions permanentes et celle qui a lieu jusqu’au 12 novembre 2023 est une des plus importantes : Yves Saint Laurent : Transparences, Dédiée à l’utilisation de la dentelle par le grand couturier, cette expo est une collaboration entre le Musée Yves Saint Laurent Paris. A travers les salles, plus de 60 modèles, accessoires, accompagnés de croquis et d’échantillons présentes les créations et la réflexion de Saint-Laurent sur la dentelle, le jeu de voilement/dévoilement du corps de la femme depuis les années 60 jusqu’à l’aube des années 2000. Les coupes et jeu de tissus révèlent des silhouettes de femmes puissantes, confiantes en elles et sensuelle. Une exposition sexy en diable en qui ravira les amateurices de jolies choses.
Aux étages supérieurs, c’est donc l’exposition permanente. On commence par un historique de la dentelle, d’abord faite à la main puis enfin, mécanisée avec l’invention métier jacquard et ses cartes à trous. La dentelle devient plus « mainstream » et la qualité des dentelles de Calais la font devenir très recherchée. En ville, les usines poussent comme des champignons et la physionomie de Calais change.
Au cours de la visite, vous assisterez même à une démonstration de tissage sur un métier Leavers, comme à la grande époque. C’est tout simplement dingue de penser que des machines aussi lourdes puissent produire un tissu d’une telle délicatesse. Et si vous pensez qu’une seule machine fait du bruit, imaginez-vous dans une énorme fabrique ou des dizaines de machines fonctionnent en cœur.
Les métiers de la dentelle sont aussi expliqués avant de passer à la partie mode et design, avec de très jolies pièces anciennes mais aussi plus contemporaines. Bref, j’ai adoré cette plongée dans le monde d’un savoir-faire tellement unique !
Petit plus : il y un café sur place, si vous avez besoin de vous restaurer.
Cité internationale de la dentelle et de la mode
135, quai du Commerce
62100 Calais
Calais, la plage, son dragon…
Calais, historiquement, c’est un port. Le point le plus proche de l’Angleterre, la grande ville de la Côte d’Opale. Si proche qu’on peut voir les blanches falaises d’Albion depuis les sables de sa plage. Evidemment, il fallait qu’on aille voir ce front de mer et comme la journée est belle, les conditions sont idéales pour les observer. Il y a comme un petit air de vacances qui flotte dans l’air. De gros nuages paresseux créent des jeux d’ombre et de lumière sur la plage et sur le Manche qui oscille entre le vert et le marine. On pourrait passer des heures à regarder les ferries et cargos faire la traversée. C’est l’autre vibration qui ressort de la plage de Calais, cette excitation des arrivées et des départs, quelque chose dans l’air qui sent autant l’aventure que l’iode.
Soudain, sur la digue, surgit un animal qui n’existe que dans les contes (et les séries TV à succès) : un dragon !
Un jour, les habitants de Calais se réveillèrent pour découvrir sur leur plage un dragon, comme apparut de nulle part. En fait, les ouvriers travaillant à l’agrandissement du sort auraient descellé, à leur insu, une pierre qui scellait le passage entre le monde fantastique et le nôtre. Un dragon bleu s’en échappât la nuit venue. Se trouvant fort à sa place à Calais, il y élut domicile. Protecteur de terres et des mers du Nord et naturellement bienveillant, il emmène sur son dos les visiteurs à la découverte de sa ville d’adoption.
Le conte est bien joli mais évidemment, le Dragon bleu est une grande machine, née de l’imagination de François Delaroziere, l’un des cerveaux derrière les fameuses Machines de Nantes (entre autres). Et ce dragon est une vraie merveille. Aussi grand que ce que l’on imagine, sa cuirasse qui mélange du bleu, du vert et du jaune, rappelle les couleurs de la plage de Calais. Comme tout dragon qui se respecte, il crache de la fumée, du feu et même de l’eau ! En cours de visite, il déploie ses ailes pour le plus grand plaisir de tous et sa queue, qui se termine un peu comme une queue de scorpion, brille comme si une braise permanente y résidait. Mais outre la taille, ce qui est le plus impressionnant, que sont les expressions du visage du dragon. Il tourne la tête, plisse des deux et quand lorsque ses yeux se sont posés sur moi, pendant une seconde, je me sentie comme Jaime Lannister face à Drogon et un frisson a couru sur mon échine !
201 Av. Winston Churchill
62100 Calais, France
L’Hôtel de ville… de deux villes
L’un des monuments les plus importants de Calais, c’est son Hôtel de ville, doublé d’un beffroi qui, comme tous les beffrois de France et de Belgique, est inscrit au patrimoine de l’UNESCO. Comme celui de Lille, c’est un beffroi essentiellement construit pendant l’entre-deux-guerres et qui mélange style régionaliste flamand, style Renaissance, avec une légère touche d’Art déco. Si sa structure est de béton armé, il est recouvert de briques de parement rouges pour lui donner sa couleur locale.
A l’intérieur, le hall d’honneur est recouvert d’une très jolie verrière. En montant les escaliers, on peut en profiter pour admirer de très beaux vitraux qui reprennent des épisodes importants de l’histoire de Calais. A l’étage, les salles semblent sortir d’un conte de fée avec des poutres en bois, des plafonds travaillés, de profondes cheminées… Un vrai décor de film !
Le clou de la visite, c’est que l’on peut grimper tout en haut du beffroi, et par ascenseur, en plus ! En compagnie de Nicolas, notre guide, nous allons en apprendre plus sur le tissu urbain de Calais qu’on peut mieux appréhender depuis là-haut. Et c’est aussi l’opportunité de faire de chouettes photos, avec les 4 chevaliers dorés posés aux 4 coins cardinaux en guest-stars.
En fait, cet Hôtel de ville avait déjà été planifié depuis la fin du XIXe siècle. A cette époque, les communes de Calais et de Saint-Pierre fusionnent. Calais est une ville tournée vers la mer, pour le commerce et pour la pêche. Saint-Pierre, elle, est une commune relativement nouvelle, une ville-champignon qui a grandi autour des manufactures de dentelle, avec une population largement ouvrière. Bien que Saint-Pierre compte plus d’habitants que Calais, la nouvelle ville portera le nom de Calais mais l’union de ses deux communes est rappelée sur une cartouche au-dessus de la porte de l’Hôtel de ville, avec un C et S-P unis dans le même blason. Vu depuis notre nid d’aigle, on voit bien la « séparation » entre les deux communes originales. Presqu’au pied du beffroi, on aperçoit une rue avec une rangée de maison qui ont survécu à la guerre, ça peut donner une idée du Calais d’antan.
Enfin, avant de quitter la ville, nous allons saluer le plus bel ornement de l’Hôtel de ville : le groupe de statues en bronze des Bourgeois de Calais par Auguste Rodin.
En 1347, les Anglais assiège Calais. La situation devenant intenable, les habitants pressent le gouverneur, Jean de Vienne, de traiter avec le roi d’Angleterre Edouard III. Il propose une reddition de la ville, en échange de la vie sauve pour les Calaisiens. En retour, le roi exige que six bourgeois se présentent à lui, en chemise, pieds nus, et la corde au cou pour lui présenter les clés de la ville. Ce qui fut fait. Les six bourgeois se présentèrent devant le roi et c’est la scène de ces 6 hommes, en route vers l’humiliation et l’échafaud, que Rodin a représenté. Chacun avec sa posture et son état d’esprit. L’un est résigné, l’autre à peur, un autre se tient fier… C’est très expressif et puissant. Ces six bourgeois auront la vie sauve grâce à Philippa de Hainaut, l’épouse d’Edouard, qui se jetât en pleurs aux pieds de son mari pour demander leur pardon. Calais restera anglaise pendant 2 siècle après ça.
Il y aurait encore des tas de choses à découvrir à Calais, notamment le street-art, la citadelle, etc. mais il est déjà l’heure de rentrer, avec un petit goût de trop peu et l’envie d’en savoir plus.
Beffroi de l’Hôtel de Ville de Calais
Pl. du Soldat Inconnu
62100 Calais
Où manger à Calais ?
Au Côte d’Argent
Situé à deux pas de la plage et avec une partie du restaurant ayant une vue directe sur la mer, c’est probablement l’un des meilleurs restaurants de calais Plage. La déco est évidemment inspirée de la marine, chaleureuse. La terrasse est également un bel atout mais c’est surtout dans l’assiette que ça se passe. Avec un BIB gourmand, pas étonnant qu’on y mange très bien. Au menu, plateau de fruits de mers et de crustacés divers, des plats de poissons locaux (sole, bouillabaisse calaisienne…), de la viande et même des options végétariennes. J’avais opté pour un délicieux dos de cabillaud, purée de carottes, petits pois et chou-fleur grillé et en dessert, une délicieuse tarte aux fraises et crème fouettée. On est dans le classique mais quand c’est bien fait, c’est un régal !
1 Digue Gaston Berthe
62100 Calais
Comment aller à Calais
Depuis l’une des deux gares de Lille (Lille Flandres et Lille Europe), vous prendrez soit un TER Hauts-de-France (une grosse heure) pour Calais Ville (qui est à proximité de l’hôtel de ville) soit un train à grande vitesse (30 minutes) mais qui arrive à la gare TGV de Calais – Fréthun, à plusieurs kilomètres de Calais. Il faudra donc rejoindre la ville en bus ou en TER.
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